Officiellement, selon l’ONU, nous serions 8,2 milliards d’êtres humains aujourd’hui, et la population mondiale culminerait à 10,3 milliards vers le milieu des années 2080.
Mais un nouveau travail de chercheurs finlandais soulève une question vertigineuse : et si nous avions déjà franchi ce seuil, sans même nous en rendre compte ?
Compter l’humanité, une mission impossible
Une chose est sûre : recenser précisément chaque habitant de la planète est une tâche titanesque.
- Dans les pays riches, les recensements sont réguliers et complets.
- Ailleurs, de larges pans de population échappent aux registres : villages isolés, zones de conflit, régions pauvres.
- Et 850 millions de personnes dans le monde n’ont tout simplement aucun document d’identité : invisibles pour les statistiques.
Même les satellites sont d’une aide limitée. Les mégalopoles brillent dans la nuit et se laissent compter, mais les hameaux cachés sous les arbres ou dispersés dans les collines passent inaperçus depuis l’espace.
Une découverte inattendue en étudiant… les barrages
À l’origine, l’équipe de l’université d’Aalto (Finlande) ne cherchait pas à contester les chiffres de l’ONU. Leur objectif était plus modeste : mesurer combien de personnes avaient été déplacées lors de la construction de grands barrages, en Chine, au Brésil, en Australie ou en Pologne.
En comparant les données officielles aux grands ensembles statistiques utilisés dans le monde, les chercheurs ont fait une découverte surprenante :
- dans les campagnes, la population était en moyenne sous-estimée de 53 %,
- et dans certains cas, jusqu’à 84 %.
En clair, les meilleures bases de données mondiales ne comptent souvent que la moitié des habitants ruraux.
Des milliards « invisibles »
D’après l’ONU, en 2020, 43 % de l’humanité vivait à la campagne, soit environ 3,5 milliards de personnes.
Mais si ces chiffres sont faux de 50 %, cela ferait 5,25 milliards de ruraux.
Et avec une erreur de 80 %, 6,34 milliards.
Addition faite, cela signifierait que la population mondiale pourrait déjà atteindre 10 à 11 milliards d’habitants.
Pourquoi ça change tout
Ces chiffres ne sont pas qu’une curiosité statistique. Ils conditionnent :
- la construction d’hôpitaux, de routes, d’écoles,
- la distribution de nourriture, d’eau et d’électricité,
- la planification des secours en cas de catastrophe.
Sous-estimer des millions — voire des milliards — de personnes, c’est risquer de les priver d’infrastructures vitales.
Prudence, toutefois
Les chercheurs restent prudents : la plupart de leurs données concernent l’Asie, où la sous-estimation du monde rural est connue de longue date. Dans des pays où les systèmes de recensement sont robustes, comme la Finlande ou l’Australie, les chiffres sont bien plus fiables.
De plus, si « plusieurs milliards » de personnes manquaient vraiment aux comptes, on devrait en voir les effets ailleurs : consommation alimentaire, production d’énergie, utilisation des téléphones portables.
Et maintenant ?
L’équipe finlandaise va élargir son étude avec des données plus récentes, car leur travail actuel s’arrête à 2010. Mais une chose est déjà claire : compter l’humanité est infiniment plus complexe qu’il n’y paraît.

Alexis, rédacteur de Seek & Look. J’explore et décrypte l’actualité scientifique, les découvertes marquantes et les innovations qui façonnent notre avenir.